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Le Procès (III)

Suite du Procès. Pour les deux premiers textes, vous pouvez cliquer ici (1) pour le tout premier texte ou ici (2) pour le deuxième ou aller dans le dossier "Le procès" de la colonne de droite pour le texte numéro deux. Voici que le journaliste entre en scène.

 

« Sur son banc, cet homme de trente ans ressemble à un grand adolescent .

Et le moins qu’on puisse dire c’est que sa personnalité semble à son image à la fois transparente et complètement indéchiffrable.

Les gens qui le côtoient le voient comme un garçon appliqué, courageux, gentil, plutôt éveillé.

Les études sont réussies. Un BTS et ensuite une école qui lui permet de devenir ingénieur agricole en 2002, la voie est toute tracée.

Et pourtant, Thomas est impénétrable.

Il est effacé.

Il est timide.

Pendant l’enquête, un prof de philo parle de lui comme un « enfant sans histoire ».  3711222265_b1f61d4283_z.jpg

Et du coup, le président de la cour d’assises s’arrête longuement sur cette expression : « un enfa nt, q ui plus est, sans histoire, comme si vous n’aviez aucune histoire propre » dit-il avant d’ajouter : c’est peut-êtr e le poids de la famille ? »

Une famille de 5 enfants, dont il est le quatrième.

Et c’est  lui, en 2003, qui va reprendre l’exploitation familiale d’une centaine d’hectares. Parce que pers onne d’autre n’en a vraiment envie. L’ombre du père, sûrement. 

Le poids de la famille, le poids du drame, tout ça tétanise Thomas quand il est interrogé.

Il ne trouve pas ses mots.

Il ne rassemble pas ses souvenirs.

Chaque mot, chaque phrase prononcés est une épreuve.

 

Au Palais de justice, Nicolas Balu…. »

 

J’adore les procès mais c’est bien souvent terrible. C’est cruel. C’est prenant. On pénètre dans la vie des gens comme jamais. On est au cœur de l’humain. Les deux accusés sont assis, têtes basses, sur leur chaise. Sans parler. Sans un mot. L’un d’eux ne décolle pas les yeux du plancher. Il est ailleurs. Ils attendent. Ils sont perdus dans leurs pensées.

 

Et moi , le petit journaliste , au bout de mon Bic, le moindre mot, bien choisi ou mal trouvé, bien senti ou mal pensé , je peux tuer, dénaturer, sauver, plus encore que dans tout autre exercice.

Trouille du journaliste presque débutant.

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photo Boris Herrera

 

En plus, je fais mes interventions dans l’immense salle des pas perdus, chaque mot résonne, on m’entend à 40 mètres, je déteste ça.

D’ailleurs,  plus tard, dans un autre palais de justice, lors d’un procès de prêtre pédophile, un quidam viendra m’arracher le papier que je faisais en direct parce que ce que je disais ne lui plaisait pas.

Commentaires

  • Continue, Nicolas, c'est émouvant! et je t'écris ce commentaire en direct du Cuej où les petits premières années sont en train de bosser sur une séance de correctionnelle... Souvenirs, souvenirs... et bisous!

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