Le 8 septembre dernier, Joseph Kennedy renonce à suivre les pas de son oncle Ted. Finalement, no c'est no, il ne récupérera pas le siège de sénateur du Massachussets laissé vacant par le dernier des fils de Joe Kennedy. Visiblement, ça ne fait pas que des heureux, comme le Herald Tribune par exemple. Personnellement j'aurais titré "His heart doesn't belong to Teddy" mais c'est une question de (mauvais) goût.
Laissons donc Joseph, ses turpitudes politiques et son avenir de sénateur du Massachussets déjà derrière lui pour le retrouver patron de la Massachussets gas company en pleine décrépitude. C'était en 2000.
Thierry reprend le clavier pour raconter sa rencontre (cf épisode I, indispensable pour saisir la suite). Et déjà à l'époque, le rejeton Kennedy savait dire No en faisant croire qu'il aurait pu dire Oui.
(...) JK arrive, incongru dans ce décor minable. Il est grand, épaules carrées, crinière blonde bouclée, œil clair, chemise ouverte, accueil et sourire chaleureux, ton naturel, franc et sincère. Du grand art. On peut supposer qu’effectivement toutes les nanas se l’arrachent. J’ai regardé sur Internet son petit discours lors de l’enterrement de son oncle Ted, il n’a pas changé. Le poil a blanchi, la peau est moins tendue, mais c’est la même aisance.
On s’entasse dans une petite salle aveugle, déjà pleine bien sûr. J’ai la tête entre les archives 1996 et le fax (nous serons quatre à devoir sortir quand la secrétaire-assistante voudra envoyer une télécopie). Le café est mauvais, c’est normal.
Puis s’engage la réunion, dans une atmosphère surréaliste : ni lui, ni nous n’avons les moyens de nos ambitions déclarées. On va donc jouer à « Je te tiens, tu me tiens par la barbichette ». JK nous présente William, son responsable de l’activité Brooker télécom. Nous présentons notre groupe informatique et Internet, ils présentent leur nouvelle entreprise, ses objectifs, son organisation.
Nous rentrons dans le cœur du sujet : AS propose que nous soyons leur représentant pour ce business en Europe. Pas de chance, William rentre de France, il vient d’ouvrir un bureau à Paris et d’embaucher deux minettes pour faire l’interface avec les clients. Nous insistons sur la nécessité d’une forte compétence technique sur place (que nous n’avons que de façon très parcellaire, mais nous ferons comme si) et d’une implantation commerciale forte. JK balaye toutes les objections : que nous lui apportions des affaires, nous serons rémunérés en tant qu’apporteurs. Et si le business avec nous devient important, il reverra sa position.
Joue-t-il au poker menteur, et ce bureau parisien n’est qu’un mythe, ou bien a-t-il des informations sur nous, et sur la réalité de notre importance sur le marché européen ?
Nous sommes repartis, Gros-Jean comme devant, accompagnés de ses au revoir chaleureux, renouvelant le souhait de travailler ensemble dans une relation simple et pragmatique. Nous étions venus pour rien.
Voila, ma rencontre avec Joseph Kennedy est une non-histoire. Mais, dans ce petit désastre, les ruines de sa splendeur passée, l’inanité de notre démarche… j’ai eu le sentiment de rencontrer un seigneur.