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pau

  • Un beau vieil homme (III)

    J'entre chez Hitler.

     

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     Dans sa salle de bain, je découvre sous sa baignoire une pile de lames de rasoir Solingen (un très bon acier allemand) où est inscrit "Für Adolf Hitler" (il le prononce dans un accent allemand du pays basque). Je vais vous dire, je me suis rasé longtemps avec. Mais un jour ma pauvre grand-mère qui avait toujours le balai à la main tombe sur ces vieilles lames usées et les fiche en l'air ! Tout comme mon carnet où j'avais noté tout mon quotidien dans la deuxième DB, depuis le Maroc ! "

    Joseph reprend son souffle. Puis, de sa voix douce et rocailleuse, il demande avec malice s'il peut raconter "une anecdote". A dire vrai, cette "anecdote" est son morceau de bravoure, le coup d'éclat d'un libérateur basque de 21 ans.

    "Chez Hitler, dans sa villa, je suis aussi tombé nez à nez sur des cornes de cerf , magnifiques, dans son salon.

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     Il y a écrit 1933 sur le crâne, l'année de son accession au pouvoir. Je me suis dit "Tu vas l'emmener à la maison !" Comme un trophée. Mes camarades me disent "Qu'est-ce que tu vas foutre avec ça ! Tu n'arriveras jamais à les passer." Je décroche les cornes et les cache sous une bache dans mon GMC (NDLR : camion Général Motors). Je les ai stockées à Paris chez ma tante, dans son grenier, le temps que les liaisons férroviaires soient rétablies. Et un an et demi plus tard, je reçois un coup de fil de la gare de Cambo les Bains qui me prévient qu'une grande caisse vient d'arriver pour moi. C'étaient les cornes.

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    Eh bien ces cornes d'Hitler, elles sont restées là, chez moi. De Berstädtgaden à Hasparren, quel périple ! Je les ai mises dans mon bureau, au salon, et même dans une chambre. Elles prenaient beaucoup de place , à la fin, je ne savais plus trop où les mettre. Alors je les ai données au musée de la résistance de Pau. Vous les verrez au premier étage. C'est pour les jeunes générations, pour que les gens n'oublient pas la guerre. Je n'ai pas voulu les vendre une fortune sur internet, au risque de tomber sur des nostalgiques du nazisme."

     

    (photo 2e DB Gaston Eve, un autre témoignage)

    On les imagine, ces bois morbides, défigurant la pièce où le vieil homme n'aspire plus qu'à la sérénité. Une relique du Fürher, à Hasparren, dans la cité de Francis Jammes où le poète goûtait le charme premier du pays basque. Le bureau de Joseph n'est pas tout à fait un musée de la guerre. Certes, on est saisi par le portrait géant de son héros, le général Leclerc, peint d'après une petite photo donnée par sa femme à un artiste local.

    Dans une vitrine en verre, quelques médailles militaires, la légion d'honneur reçue il y a dix ans, mais aussi des médailles de l'ancien double champion de france de rebot en 1954 et 1955 (le rebot, cette discipline de pelote basque que j'aimais beaucoup, sans exagérer, j'étais un très bon buteur ! ) . Des tas d'archives, bien sûr, des piles de livres historiques, et le journal l'Equipe, le quotidien sportif. Et un agenda ouvert, un agenda 2010, rempli de rendez vous.

    la suite du portrait de Joseph Bonnet par Christophe Van Veen très bientôt !!